2011-09-23

Anniversaire du décès d'Émilie Gamelin (23 septembre)

Voici une réflexion sur la femme extraordinaire qu'a été Émilie Gamelin , faite par l'abbé Gérald Chaput en ce jour de son anniversaire.

Réjouissons-nous. Nous célébrons la mémoire d'une femme d'ici, née ici, dont la manière de vivre fut signé  Jésus-Christ, femme aux comportements divins et dont la fascination pour les exclus, les sans «situations», les sans emploi, les repoussés, en a interpellé d'autres à faire de même.
Réjouissons-nous. Ceux qui n'étaient bon à rien pour le monde de son temps étaient pour elle dignes du Dieu de sa foi. Elle est sortie à la première, troisième, cinquième et neuvième heure du jour pour offrir au non « recherchés », au non «désirés», un même regard de dignité (Mt 20, 1-16). Pour elle, ces visages étaient des pages d'Évangile sur lesquelles Jésus avait gravé son visage divin.


Réjouissons-nous. Ceux que la société considérait comme inutilisables, les incapables, les infirmes, les sans éducation, les maladroits, les peu ou pas « doués», ceux qui n'ont rien su faire de leurs talents (Mt 25, 14-18) comme ceux qui étaient sans «situation», sans «espérance», sans emploi, sans «apparence», parce que personne ne daignait poser sur eux un regard « invitant », Mère Gamelin les recherchait, les désirait. Avec des moyens dérisoires, elle s'empressait de les inviter à une table de noces, une table divine (Mt 22, 1-14), une table royale.  Sa table et son cœur n'étaient fermés à personne.

Réjouissons-nous. Elle s'en est allée aux croisés des chemins car la Sagesse crie aux carrefours (Pr 1, 20). Elle a parcouru les places publics -ne trouve-ton pas un place Gamelin!- à la rencontre des drogués et des moins que désirables de la société. Elle s'est hâtée d'être femme de visitation auprès des veuves et des sans abris, des prisonniers et des malades.  Elle était Écriture que pouvait lire les illettrés parce qu'elle était comme l'exprime un psaume (103, 15), le pain [qui] fortifie et le vin [qui] réjouit le cœur de l'homme. 



Réjouissons- nous. Cette femme vaillante (Pro 31, 10), «en or», entreprenante, avisée, attentive, perle précieuse de savoir-faire et de savoir-vivre, pour rendre le monde plus humain (GS 40), s'est faite débitrice (Mt 18, 21-35) de tous ses contemporains. Pour elle, et en cela elle signait de sa vie ce que saint Léon le Grand exprimait (et c'est très fort, très ébranlant) : lorsque nous donnons aux miséreux ce qui leur est nécessaire, nous ne leur faisons pas de largesses, nous ne faisons que rendre ce qui leur appartient.
Mère Gamelin en devait toujours à tout le monde. Elle recherchait vivre avec les moins que rien, les non éduqués pour leur offrir un visage de compassion. Elle avait cette vive conscience que sa foi la rendait débitrice des talents qu'elle avait reçus. Pour elle, ses biens n'étaient pas les siens. Elle n'en était que dispensatrice.



Heureux qui comprend ce grand mystère de la désappropriation de tout, même de sa vie. Heureux qui regarde non pas la pauvreté, mais la personne du pauvre. Heureux qui considère un corps défiguré par la souffrance non indigne de son assistance. Heureux qui voit non le prisonnier, mais un « adoré» que Dieu recherche. Voilà ce que Mère Gamelin a compris.  



À votre contemplation : C’est aux fruits que nous reconnaissons un arbre (Mt 12,33). C’est à leurs œuvres que nous reconnaissons ceux qui font profession d’appartenir au Christ. Mère Gamelin a mise sa confiance en Dieu comme si tout dépendait d'elle et non de lui. Elle s'est livrée à l'Action comme si tout dépendait de Lui et non d'elle (Maxime du  jésuite hongrois Hevenesi (XVIIIe siècle) attribuée à saint Ignace). AMEN. (Avec permission de l'auteur)